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L’environnement bâti représente une part importante des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES),1 dont plus de la moitié provient des bâtiments résidentiels.2 On estime que les bâtiments représentent 18 % des émissions de GES du Canada lorsqu’on tient compte des émissions directes et indirectes,3 ce qui représente une part importante.
La construction de bâtiments selon les normes habituelles – ou d’une manière qui n’est pas prête pour la carboneutralité – verrouille les émissions sur des décennies. De plus, la décarbonisation peut entraîner des coûts futurs importants si les politiques réglementaires exigent un changement en matière de carboneutralité. Autrement dit, la construction carboneutre n’est pas seulement importante pour la réduction des émissions, mais peut aussi être un investissement judicieux pour les propriétaires d’actifs.
Angela Adduci, conseillère principale, Politiques à l’Institut pour le climat de BMO, a récemment rencontré Kathleen Beaumont, directrice générale, Impact et ESG, Forum Asset Management*, et Paul Morassutti, président du conseil d’administration, CBRE Limited, pour discuter de nouveaux renseignements sur le coût et la valeur des actifs de la construction résidentielle carboneutre au Canada.
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BMO a également récemment ouvert sa première succursale construite selon les normes les plus élevées en matière de méthodes de construction écoénergétiques et de conception à faibles émissions de carbone, en utilisant des matériaux à haute teneur en matières recyclables, du bois de charpente et du béton à faibles émissions de carbone.
La succursale de BMO à Kitchener, en Ontario, est conçue pour respecter les normes Passive House Classic et du bâtiment à carbone zéro du Conseil du Bâtiment Durable du Canada
La construction carboneutre n’est pas seulement importante pour la réduction des émissions, mais peut aussi être un investissement judicieux pour les propriétaires d’actifs. – Alma Cortes Selva, Institut pour le climat de BMO
Ce point de vue n’est pas encore bien compris. Ce rapport analyse l’incertitude des propriétaires d’immeubles à l’égard de la valeur prévue future associée aux bâtiments décarbonisés. Les données du sondage de la National Association of Home Builders du Canada indiquent que les constructeurs et les rénovateurs croient que les bâtiments carboneutres ont des avantages liés au coût et au rendement. Toutefois, 84 % des répondants affirment que les perceptions des consommateurs à l’égard des coûts ont une influence sur les décisions relatives à l’établissement de normes de carboneutralité.4
Le gouvernement fédéral canadien a lancé un nouveau plan sur le logement visant à combler un déficit estimé à 5,8 millions de logements et à l’harmoniser avec les objectifs de carboneutralité. Toutefois, le contexte économique difficile caractérisé par des taux d’intérêt élevés, des contraintes et des frais réglementaires, ainsi que des pressions inflationnistes persistantes, pour ne nommer que quelques facteurs, pose des obstacles importants. Ces conditions peuvent empêcher les promoteurs privés de soutenir pleinement les objectifs du plan et d’atteindre les rendements financiers attendus par leurs investisseurs.
Compte tenu de ce défi, l’Institut pour le climat de BMO, en partenariat avec Forum Asset Management, a effectué une analyse axée sur les coûts associés à la construction d’immeubles résidentiels à logements multiples carboneutres et leur valeur prévue par rapport aux immeubles de base au Canada. Cette analyse a été examinée par des représentants de la Banque de l’infrastructure du Canada, de REALPAC et de CBRE.
Voici les principaux points à retenir de l’analyse :
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En moyenne, l’atteinte d’une norme de rendement carboneutre peut être aussi rentable que les normes de construction traditionnelles, mais la rentabilité dépend actuellement considérablement des incitatifs gouvernementaux.
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Les bâtiments carboneutres peuvent être un investissement plus durable dans un contexte d’évolution rapide du climat, de l’économie et de la réglementation.
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Les bâtiments carboneutres peuvent présenter un profil de risque moins élevé et faire profiter d’économies sur les coûts opérationnels et réglementaires, ce qui peut se traduire par des taux de capitalisation moins élevés et des valeurs d’actif plus élevées.
Cliquez ici pour lire l’analyse complet.
(Aaron Huang, directeur général, Financement immobilier, BMO, et Kathleen Beaumont, directrice générale, Impact et ESG, Forum Asset Management, ont également contribué à cet article.)
*Depuis l’enregistrement du balado, Kathleen Beaumont a quitté son poste à Forum Asset Management.
1 International Energy Agency. Buildings - Energy System. IEA. Published July 11, 2023.
2 IEA (2023), Global CO2 emissions from the operation of buildings in the Net Zero Scenario, 2010-2030, IEA, Paris, License: CC BY 4.0.
3 Annex: Homes and buildings. www.canada.ca. Published February 12, 2021.
4 “Green Single Family and Multifamily Homes 2020.” National Association of Home Builders, 2020.
Transcription
Paul Morassutti :
Lorsqu’on se concentre aveuglément sur les coûts – même si c’est important et qu’il faut le faire – on passe à côté d’une vue d’ensemble. C’est ce que nous constatons maintenant lorsque nous parlons de construction de bâtiments à énergie zéro. On a tendance à mettre fortement l’accent sur le coût et le rendement. Je crois que la grande question est la suivante : que souhaitez-vous posséder dans dix ans?
Michael Torrance :
Bienvenue au balado Leaders et durabilité. Je m’appelle Michael Torrance et je suis chef de la durabilité à BMO. Dans cet épisode, nous nous entretiendrons avec des professionnels de la durabilité de premier plan issus du milieu universitaire, des affaires, de l’investissement et des ONG afin d’explorer l’incidence du domaine de la durabilité en évolution rapide sur les pratiques d’affaires en matière de placement à l’échelle mondiale et sur notre monde.
Avis :
Les opinions exprimées dans ce balado sont celles des participants et non celles de la Banque de Montréal, de ses sociétés affiliées ou de ses filiales.
Angela Adduci :
Bienvenue à un nouvel épisode du balado Leaders et durabilité. Je m’appelle Angela Adduci et je travaille à l’Institut pour le climat de BMO, et je suis accompagnée aujourd’hui de Kathleen Beaumont, directrice générale, Impact et ESG, Forum Asset Management, et de Paul Morassutti, président du conseil d’administration de CBRE Limited. Kathleen et Paul, je vous remercie de vous joindre à nous.
Kathleen Beaumont :
Merci de nous accueillir.
Angela Adduci :
Aujourd’hui, nous discuterons d’une collaboration en matière de recherche entre BMO et Forum Asset Management qui a récemment été publiée. Cette recherche était axée sur la carboneutralité des immeubles résidentiels de grande hauteur. Nous avons examiné les coûts associés à la construction de ces bâtiments et leur valeur prévue par rapport aux bâtiments construits conformément aux normes de base. Nous avons eu la chance de faire participer CBRE à titre d’examinateur expert de cette recherche, et je suis très enthousiaste à l’idée d’explorer les conclusions. Kathleen, vous avez été une excellente partenaire dans le cadre de ce projet et j’aimerais que vous expliquiez à notre auditoire pourquoi vous jugiez cette recherche si importante.
Kathleen Beaumont :
Merci, Angela. Oui, nous savons que si nous poursuivons sur la voie actuelle, ce ne sera pas une bonne chose pour notre avenir climatique, et au bout du compte, les bâtiments représentent une grande partie des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Il est bien connu qu’environ 40 % des émissions sont générées par le carbone opérationnel et le carbone intrinsèque dans l’environnement bâti. Au Canada, les bâtiments représentent 18 % de ces émissions, directes et indirectes. Et la moitié d’entre elles proviennent de bâtiments résidentiels. Mais il n’y a pas eu beaucoup de recherches menées sur les immeubles résidentiels en particulier, pour diverses raisons. Nous voulions commencer la conversation ici. Au bout du compte, les bâtiments carboneutres sont plus coûteux à construire en ce moment. Les coûts initiaux de construction sont plus élevés, mais nous pensons que ces coûts initiaux plus élevés peuvent être contrebalancés par des économies opérationnelles, ce qui peut se traduire par une valeur globale de l’actif plus élevée. Nous avons tenté de le démontrer au moyen d’une étude de cas dans ce document et de valider cette réflexion intuitive. Nous voulions explorer un peu plus ce dilemme perçu.
Angela Adduci :
Merci, Kathleen. Je veux donc passer aux conclusions de la recherche, mais avant, je veux m’assurer que nous établissons le contexte approprié. La question s’adresse à vous deux ou à l’un d’entre vous : quelles sont les questions les plus fréquemment posées aux promoteurs immobiliers commerciaux par les acteurs sur le marché au sujet de la construction carboneutre au Canada?
Kathleen Beaumont :
Fondamentalement, je crois que les acteurs sur le marché posent les mêmes questions au sujet de la construction traditionnelle au Canada, mais simplement dans une optique améliorée. Quels types de règlements municipaux sont en place? Y a-t-il des occasions et quelles sont les exigences? Quelles sont les répercussions financières? Quels sont les coûts associés au virage vert et quels sont les incitatifs offerts si je fais un choix plus écologique? De plus, quels sont les avantages des décisions que nous prenons? Quels sont les avantages opérationnels? Quels sont les avantages du crédit-bail? Quels sont les avantages de la prise de ces décisions en matière de mobilisation de capitaux? Je crois qu’il s’agit simplement de redéfinir la façon dont nous posons les mêmes questions et d’absorber des renseignements supplémentaires dans notre processus de prise de décision.
Paul, avez-vous quelque chose à ajouter?
Paul Morassutti :
Je crois que c’était une très bonne réponse. J’ajouterais que cela dépend de la région du monde dont vous parlez. De toute évidence, lorsque nous parlons à des investisseurs mondiaux qui se trouvent au Royaume-Uni, dans l’Union européenne et en Australie, ils ont une longueur d’avance sur l’Amérique du Nord, alors leurs questions sont différentes. Au Canada, nous en sommes aux balbutiements d’une véritable sensibilisation aux facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans le secteur de l’immobilier commercial et le secteur résidentiel. Comme Kathleen l’a mentionné, bon nombre des questions que l’on me pose sont assez simples. Elles portent sur les coûts supplémentaires et le remboursement. Comme j’ai de l’expérience en évaluation, on me pose souvent la question suivante : « Quelle sera la valeur additionnelle de mon immeuble par rapport à un immeuble qui n’a pas certaines de ces caractéristiques? » De mon point de vue, je passe (et nous passons) beaucoup de temps au Canada à informer le secteur sur ce qui se passe dans d’autres régions du monde, sur ce qui se passe avec la réglementation à venir, et à rappeler aux gens que le choix ne leur appartiendra pas totalement et qu’ils seront obligés de faire beaucoup de ces choses.
Et j’ajouterais qu’une grande partie de cette discussion, presque mot pour mot dans certains cas, est semblable à la discussion que nous avons eue au sujet des premières fois où nous avons commencé à élaborer les normes LEED, il y a probablement 15, 16 ou 17 ans au Canada. À ce moment-là, nous avons beaucoup discuté des coûts de construction supplémentaires : « Puis-je obtenir des loyers supplémentaires pour couvrir ces coûts? » « Mon taux de capitalisation sera-t-il inférieur? » Et ce qui s’est passé, c’est que la discussion a pris fin assez rapidement, car les normes LEED sont devenues presque le code du bâtiment de facto, et les gens ont commencé à se rendre compte que si vous voulez avoir un bâtiment durable et qui ne devient pas économiquement obsolète le jour où vous ouvrez les portes, vous devez prendre ces mesures. Lorsqu’on se concentre aveuglément sur les coûts – même si c’est important et qu’il faut le faire – on passe à côté d’une vue d’ensemble. C’est ce que nous constatons maintenant lorsque nous parlons de construction de bâtiments à énergie zéro. On a tendance à mettre fortement l’accent sur le coût et le rendement. Je crois que la grande question est la suivante : que souhaitez-vous posséder dans dix ans?
Angela Adduci :
C’est un contexte très intéressant, et il est vraiment fascinant d’entendre parler des parallèles avec les normes LEED et de la façon dont cela s’est passé au bout du compte.
Nous avons donc préparé le terrain. Passons directement aux conclusions.
Kathleen, quels sont les principaux points à retenir de cette recherche et avez-vous été surprise par ce que nous avons trouvé?
Kathleen Beaumont :
En résumé, notre analyse conclut que la construction en fonction d’une norme de rendement carboneutre peut être en moyenne aussi rentable qu’une construction suivant les normes traditionnelles. Mais nous avons constaté que la rentabilité dépend actuellement fortement des incitatifs gouvernementaux et de la collaboration à l’échelle des secteurs public et privé. Nous avons également constaté que les bâtiments carboneutres peuvent être des investissements plus durables dans un contexte d’évolution rapide du climat, de l’économie et de la réglementation. Enfin, nous croyons que ces deux éléments peuvent mener à un profil de risque moins élevé et faire profiter d’économies sur les coûts opérationnels et réglementaires, ce qui peut se traduire par des taux de capitalisation moins élevés et des valeurs d’actif plus élevées. Je ne dirais pas que les résultats m’ont surprise. Comme je l’ai dit, ils confirment plus ou moins l’intuition. Je crois toutefois que nous évoluons dans un environnement qui nécessite une collaboration entre les secteurs public et privé. Comme Paul l’a mentionné, nous en sommes aux premières étapes au Canada. Pour cette raison, il s’agit d’un effort de collaboration entre toutes les parties prenantes.
Il suffit de penser aux horribles inondations soudaines que nous avons connues en Ontario. L’autoroute Don Valley Parkway, une grande artère à Toronto, a été tellement inondée que des voitures étaient sous l’eau. Les répercussions sociales et financières de ces événements plus fréquents augmentent de façon exponentielle, et il est de plus en plus difficile pour les organismes de réglementation de ne pas en tenir compte; il est plus probable de voir une politique climatique plus agressive. De plus, les bâtiments qui contribuent positivement à un avenir à faibles émissions de carbone sont plus susceptibles d’être préparés à divers contextes réglementaires. Au bout du compte, je crois que ce que nous avons constaté, c’est que, grâce à cela, nous pouvons voir des taux de capitalisation comprimés qui démontrent un profil de risque moins élevé pour ce type de bâtiment carboneutre.
Angela Adduci :
Paul, vous avez parlé un peu plus tôt des évaluations du contexte. J’aimerais m’adresser à vous un instant et approfondir cette question. Cette recherche, comme Kathleen l’a mentionné, remet en question les hypothèses qui peuvent être formulées au sujet du coût et de la valeur de la construction selon des normes de carboneutralité. Et nous savons, nous l’avons vu, que le coût est l’un des facteurs les plus importants, voire le plus important, qui a une incidence sur les décisions relatives à la construction carboneutre. Compte tenu de cette expertise et de ces évaluations, selon vous, qu’est-ce que cette recherche et nos conclusions signifient pour les propriétaires d’actifs, les investisseurs et les promoteurs au Canada pour l’avenir?
Paul Morassutti :
Tout d’abord, je dirais que les recherches effectuées par Kathleen et Forum sont excellentes et que nous avons vraiment besoin qu’il y en ait davantage dans le secteur. Je crois qu’il est très opportun et très important de parler de ce qui s’est passé à Toronto au sujet des inondations, et cela souligne l’importance non seulement de la construction de bâtiments à énergie zéro et de la résilience des bâtiments, mais aussi de la résilience des villes. Et de plus en plus, à mesure que nous irons de l’avant, les villes qui ont une résilience aux changements climatiques auront presque un effet de halo sur les bâtiments de cette ville, et les bâtiments qui sont construits selon une certaine norme. Je suis d’accord avec Kathleen, leur profil de risque sera moins élevé. En fait, les taux de capitalisation ne sont rien de plus qu’une évaluation du profil de risque d’un actif. Et si vous envisagez un immeuble qui obtient de meilleurs résultats en ce qui a trait aux caractéristiques de placement, et je crois que la résilience aux changements climatiques est l’une de ces caractéristiques, vous aurez un taux de capitalisation moins élevé.
Les facteurs que nous soulignons pour appuyer les primes de valeur, et je peux parler un peu de la durée de ces primes, vont au-delà des coûts. Donc, si nous sortons du secteur résidentiel pour un moment, et je crois que ce sera le cas sous peu dans le secteur résidentiel, nous examinons de plus en plus les occupants de bâtiments, les locataires de bâtiments, dans l’ensemble du spectre des différents types d’actifs, nous voyons des entreprises qui ont de solides engagements ESG et, si elles ont un solide engagement ESG, peut-être pour atteindre la carboneutralité d’ici 2030 ou 2040, elles doivent se trouver dans un immeuble conforme à ces normes. Ainsi, de plus en plus, si vous avez un immeuble qui n’est pas décarbonisé ou si vous ne construisez pas selon une norme de construction de bâtiments à énergie zéro, vous perdez une grande partie du marché. Vous perdez également votre capacité de sortie, car de plus en plus, les investisseurs, petits et grands, mais certainement les grands investisseurs, veulent acheter des actifs qui correspondent à leur engagement en matière de carboneutralité. Votre capacité à vendre sera donc bien meilleure si vous avez un immeuble durable.
Comme Kathleen l’a souligné, des coûts d’exploitation moins élevés se traduisent par des loyers nets plus élevés et un meilleur revenu net d’exploitation. C’est certain. Troisièmement, il y a l’évolution du contexte réglementaire. Cette année, à New York, pour la première fois, une réglementation pénalisera les propriétaires d’immeubles qui génèrent des émissions de gaz à effet de serre supérieures aux normes établies. Selon les dernières données, près de 100 États et municipalités différents adoptaient des règlements similaires en Amérique du Nord. Du point de vue de la réglementation, vous serez obligé de le faire.
Enfin, je dirais qu’au Canada, nous avons une taxe sur le carbone. Je ne sais pas combien de temps elle durera, mais elle est en vigueur en ce moment et vous payerez davantage d’impôts si vous êtes un grand émetteur d’énergie. À Toronto, si vous bâtissez en fonction de normes plus élevées, des crédits liés à la décarbonisation sont offerts.
Angela Adduci :
Paul, vous avez parlé du contexte réglementaire à court terme et à l’heure actuelle. Pour ce qui est du moyen terme, et il s’agit peut-être d’une question un peu plus difficile, compte tenu de l’ambiguïté, mais selon vous deux, comment le contexte économique et réglementaire au cours des cinq à six prochaines années, disons, influencera-t-il la demande liée à la construction selon ces normes de carboneutralité?
Paul Morassutti :
Je dirais que nous devons composer avec une partie de ce qui fait du bruit actuellement sur le marché, à savoir en quelque sorte une réaction anti-« woke » et anti-ESG qui, selon moi, est un peu temporaire, un peu liée au fait que les coûts de toutes sortes ont augmenté au cours des dernières années et qu’il y a une réelle préoccupation au sujet de l’inflation. C’est pourquoi le gouverneur de New York vient d’éliminer la taxe sur la congestion à New York, qui était prévue depuis une décennie. Nous devons donc traverser cette période tumultueuse. À mon avis, une fois que nous aurons passé cette période, au fil des années, tout cela deviendra davantage la norme que l’exception. Et les parties du secteur – et nous en avons beaucoup parlé – qui continuent à faire l’autruche pourraient se retrouver avec des actifs (en particulier dans le marché des bureaux) qui ne valent pas autant que d’autres actifs qui ont mis en place des stratégies de durabilité appropriées. Je crois simplement que cela deviendra plus normalisé d’année en année.
Kathleen Beaumont :
Même si le contexte réglementaire n’évolue pas comme nous le pensons, et qu’il demeure complaisant ou va dans l’autre sens, ces actifs particuliers sont de nature à très long terme. Donc, même si nous pensons à aujourd’hui ou à un horizon de cinq ans, dans dix ans ou dans vingt ans, les choses pourraient être différentes. Ainsi, si vous construisez en fonction d’un avenir plus probable ou complaisant, vous serez mieux positionné du point de vue de la valeur de l’actif, et le risque d’obsolescence sera moins élevé. Peu importe les décideurs au pouvoir, je crois qu’il est prudent de tenir compte de divers scénarios, y compris une politique climatique agressive.
Angela Adduci :
Kathleen, vous en avez parlé, cette recherche montre que les incitatifs gouvernementaux jouent actuellement un rôle assez essentiel dans la faisabilité et la rentabilité des bâtiments carboneutres, mais nous savons également que le secteur privé est un acteur essentiel à bien des égards. Compte tenu de cette dynamique entre le gouvernement et le secteur, selon vous, comment les partenariats public-privé peuvent-ils continuer à favoriser une construction de bâtiments carboneutres à l’avenir?
Kathleen Beaumont :
Comme nous l’avons dit, le coût est un facteur très déterminant en ce moment, en particulier dans le secteur des bâtiments carboneutres. Pour cette raison, nous avons besoin de leaders, et les leaders ont toujours des parties prenantes externes. Donc, ces partenariats public-privé ou ces incitatifs financiers pour démontrer la rentabilité, le rendement des investissements ou l’occasion d’investissement pour une carboneutralité sont nécessaires en ce moment, car nous en sommes aux premières étapes. Nous avons peu de données sur les transactions et de preuves tangibles, en particulier au Canada, dans le secteur des immeubles à logements multiples. Par conséquent, ces relations seront essentielles à la réussite. J’espère donc commencer par ce type de recherche et d’étude pour amorcer les entretiens, afin que nous puissions établir des relations et créer des études de cas en temps réel, puis dans quelques années, démontrer cela, revenir en arrière et avoir des preuves supplémentaires afin qu’à un moment donné, les mesures de récompense et de punition soient différentes.
Les mesures de récompense sont en quelque sorte ce qui est requis en ce moment, mais au bout du compte, les punitions vont arriver, ou du moins nous pensons qu’elles pourraient arriver. Par punitions, j’entends les pressions réglementaires, les politiques, les pénalités, les amendes et les impôts, ainsi que de tout ce que nous détestons entendre en tant qu’entreprises. Mais au bout du compte, à l’heure actuelle, les mesures de récompense sont vraiment très importantes. Je crois que ce que BMO fait avec la Banque de l’infrastructure du Canada dans le cadre de son initiative de rénovation est très important. J’aimerais voir quelque chose comme cela évoluer pour inclure de nouveaux développements. J’espère qu’une telle chose pourrait se produire.
Angela Adduci :
Une dernière question de ma part, pour Kathleen et Paul. Je suis curieuse de savoir quelles sont les questions supplémentaires que cette recherche a soulevées pour vous au sujet des bâtiments carboneutres, qui pourraient peut-être être le centre de futures analyses.
Kathleen Beaumont :
Nous y avons fait allusion dans le document, à la fin, lorsque nous avons dit que nous nous sommes concentrés sur les renseignements que nous connaissons aujourd’hui, comme les coûts d’exploitation et le contexte réglementaire actuel, c’est-à-dire la taxe sur le carbone que nous avons au Canada, mais il est difficile d’inclure aujourd’hui l’analyse quantitative de choses comme les mises à jour potentielles du code du bâtiment, les engagements des investisseurs à l’égard de la carboneutralité, la résilience aux événements météorologiques extrêmes et la fluctuation des coûts de l’énergie, la disponibilité de l’assurance et les pratiques de crédit. Intuitivement, toutes ces choses sont susceptibles d’avoir une incidence sur les coûts et la valeur prévue d’un immeuble, mais il est si tôt dans le processus qu’il est difficile de les quantifier. Comme Paul l’a dit, il est déjà très difficile de prendre des décisions d’évaluation dans le contexte actuel. Je crois donc que nous devons nous assurer de ne pas trop nous mettre au défi; nous devons mettre certaines choses dans la catégorie « trop difficile » pour le moment et nous concentrer sur ce à quoi nous pouvons nous atteler. Et c’est en quelque sorte continuer à pousser ce discours et à faire en sorte que les gens commencent à y penser, plutôt que de nous contenter du monde complaisant dans lequel nous exerçons nos activités, du point de vue du développement.
Même si nous avons essayé de répondre à certaines questions, l’objectif de cette étude était de créer davantage de questions afin que de plus nombreuses personnes se lancent dans ce domaine de recherche pour y répondre. Il s’agit donc de justifier et de valider quantitativement certaines des choses plus qualitatives dont nous parlons, comme le contexte réglementaire, l’appétit pour le capital des investisseurs et l’obsolescence des actifs, comme la résilience. Je crois que l’autre aspect concerne vraiment la demande. Les résidents commenceront-ils à exiger ce type de milieu de vie? Peut-être que oui, peut-être que non. C’est difficile à dire. Certains disent oui et d’autres disent non, mais encore une fois, nous sommes dans un contexte où il est déjà très compliqué de payer ses factures, alors on peut difficilement justifier d’en demander plus simplement parce qu’il s’agit d’un immeuble carboneutre. Au bout du compte, je crois qu’il y a plus de questions qui sont ressorties de cette étude que de réponses, mais je crois que c’était l’intention, n’est-ce pas? Commençons la conversation autour de ce sujet. Et je suis très enthousiaste à l’égard de la façon dont nous progresserons dans ce type de discours et de conversation au cours des prochaines années.
Paul Morassutti :
Oui, et je crois que je ne suis pas vraiment un expert des facteurs ESG, alors dans bien des cas, j’éprouve autant de difficultés que d’autres personnes du secteur. Je crois qu’une partie de la rétroaction que j’entends de la part des promoteurs et des propriétaires, et encore une fois, c’est un peu comme ce que nous avons entendu lorsque nous avons commencé à construire selon la norme LEED, mais de nombreux promoteurs ont de la difficulté à comprendre certaines chose : Quelle est exactement la norme de facto que nous devrions respecter? Qu’est-ce qu’un bâtiment écologique? Qu’est-ce qu’un bâtiment durable? Quelle est votre définition? S’agit-il d’un bâtiment doté de la certification LEED, qui n’est en fait qu’une certification ponctuelle à un moment donné? S’agit-il d’un bâtiment entièrement à énergie zéro? S’agit-il d’un bâtiment carboneutre? S’agit-il de bâtiments industriels à Toronto aujourd’hui qui sont construits selon la norme de la carboneutralité? Je sais que les développeurs ont de la difficulté à comprendre les règles et la façon de les respecter. À l’heure actuelle, les règles et les normes semblent fluctuer.
Angela Adduci :
Y a-t-il autre chose que l’un d’entre vous aimerait ajouter à cette conversation avant que nous terminions?
Kathleen Beaumont :
Je tiens simplement à vous remercier, Angela, ainsi que l’équipe de l’Institut pour le climat de BMO d’avoir collaboré à ce projet. Je crois que c’est un projet sur lequel j’essaie de travailler depuis un certain temps, et il a été plus difficile que je ne le pensais de faire appel à quelqu’un pour amorcer la conversation, mais je suis très heureuse que vous ayez été nos partenaires. De toute évidence, il est important de faire appel à des gens comme Paul et l’équipe CBRE, qui peuvent vraiment apporter une plus grande crédibilité à l’égard de ce type de recherche.
Merci, Paul.
Angela Adduci :
Eh bien, je partage ces sentiments. Merci à vous deux. J’apprécie vraiment votre collaboration dans le cadre de cette recherche et je vous remercie de votre présence aujourd’hui.
Paul Morassutti :
Merci.
Angela Adduci :
À bientôt.
Michael Torrance :
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Avis :
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