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Il est encore possible de limiter les effets de l’intensification des catastrophes climatiques sur la planète, mais il faut pour cela agir ensemble et maintenant pour atténuer les changements climatiques et s’y adapter, estime le groupe des Nations Unies chargé de l’avancement des connaissances scientifiques sur les changements climatiques causés par l’être humain dans son dernier rapport de la décennie.
Le message n’a rien de nouveau : il est minuit moins une à l’horloge de la lutte contre le réchauffement climatique. Le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) tire encore une fois la sonnette d’alarme dans son sixième rapport de synthèse, le dernier de la décennie, qui résume l’état des connaissances sur les changements climatiques et nous confirme que la hausse des températures mondiales atteindra 1,5 degré au début de la prochaine décennie.
Le constat est sans appel : le monde prend son temps, alors que l’heure est à l’urgence. Le message du GIEC n’est toutefois pas complètement noir : il indique également que, si l’on investit de la bonne façon dans les bonnes mesures d’atténuation, de résistance et d’adaptation en y mettant les ressources appropriées, il sera peut-être possible de limiter le réchauffement à moins de 2 degrés et de permettre à la planète de survivre, même s’il risque de falloir des décennies avant que l’effet de ces investissements se fasse sentir.
« La fenêtre d’opportunité dont nous disposons pour assurer à tous un avenir vivable et durable se referme rapidement », observe le GIEC, pour qui il est urgent de mettre en œuvre des initiatives climatiques intégrées à court terme. L’organisme souligne également que la lutte contre le changement climatique est autant une question de résistance et d’adaptation qu’une question de transition énergétique. Le rapport insiste d’ailleurs sur le fait que nous avons les technologies, les ressources financières et le savoir-faire nécessaires pour nous attaquer dès aujourd’hui à la crise climatique. La vraie difficulté, qui est d’ailleurs un des obstacles rencontrés par les institutions financières dans la réalisation de leurs ambitions de carboneutralité, réside dans la mise en œuvre (politique, comportement des consommateurs, réglementation, conception du marché).
La bonne nouvelle, c’est qu’on observe une vraie volonté de mener la transition à bien et qu’il y a assez d’argent pour le faire. Le manque d’investissements économiquement viables, de structures de financement hybrides public-privé innovantes et de solutions technologiquement matures sont toutefois autant d’écueils à cette transition. L’Inflation Reduction Act (IRA) adoptée par l’administration Biden constitue un pas important dans la bonne direction : il s’agit du plus important engagement climatique de toute l’histoire des États-Unis. Les Américains et le reste du monde devront toutefois en faire plus pour financer la transition.
Payer aujourd’hui pour demain
Il suffit de survoler l’actualité pour constater que les événements météorologiques graves se multiplient de façon alarmante. Les scientifiques nous disent d’ailleurs que la tendance va encore s’intensifier même si l’on parvient à limiter le réchauffement de la planète à 1,5 degré tout au long du 21e siècle. Le GIEC nous prévient en outre que, quoiqu’on fasse, les investissements réalisés aujourd’hui n’auront pas d’effets notables sur le réchauffement avant au moins une vingtaine d’années, d’où l’importance de miser au plus vite sur l’adaptation.
L’ouragan Ian, survenu en septembre dernier, a été un des plus coûteux et des plus désastreux de l’histoire des États-Unis et il constitue un avant-goût de ce qui nous attend. Cet ouragan, le plus meurtrier que la Floride ait connu depuis 1935, a causé 70 milliards de dollars de dommages et dévasté de nombreuses communautés entre cet État et la Caroline du Nord et du Sud.
Les ouragans ne sont certes pas rares dans cette région, mais ce qui caractérise Ian, c’est qu’il a pris des proportions inhabituelles une fois parvenu au-dessus du golfe du Mexique, dont les eaux étaient d’un degré plus chaudes qu’à l’accoutumée pour cette période de l’année, selon les rapports de la NASA. Selon Chris Slocum, spécialiste des sciences physiques auprès de la National Oceanic and Atmospheric Administration, le réchauffement de la mer sert de carburant aux ouragans et leur permet de durer plus longtemps. Même si les ouragans ne sont pas forcément plus nombreux, les scientifiques constatent qu’ils ont gagné en puissance (catégories 4 et 5) depuis qu’ils ont commencé à les suivre en 1980.
Le sort du Babcock Ranch, en Floride, témoigne de l’importance d’investir dans des mesures de résistance. L’établissement a investi 700 millions de dollars pour pouvoir mieux résister aux événements météorologiques extrêmes et s’en remettre plus facilement, ce qui lui a permis d’échapper au pire lorsque l’ouragan a frappé. Si le montant de l’investissement a de quoi rebuter, il en coûterait pourtant beaucoup plus cher de reconstruire. Les catastrophes climatiques ont coûté entre 200 et 260 milliards de dollars à la Floride depuis les années 1980; pour ce prix-là, l’État aurait pu construire 400 Babcock Ranches, soit à peu près l’équivalent de ses surfaces agricoles.
Le message est clair : investir maintenant dans la résistance aux changements climatiques permettra d’économiser à long terme compte tenu de l’augmentation des risques de catastrophes. Il reste à savoir ce que les gouvernements et les acteurs du marché peuvent faire pour favoriser de tels investissements à court terme et ainsi protéger l’avenir.
Catalyseurs essentiels et rattrapage du retard d’investissement
Le GIEC estime que les investissements dans l’adaptation et l’atténuation devront être multipliés par 3 à 6 par rapport aux niveaux actuels si l’on souhaite parer aux conséquences les plus graves des changements climatiques. Il faudra accélérer le déploiement des capitaux et veiller à ce qu’ils soient équitablement répartis pour combler ce déficit de financement. « Des transitions rapides et ambitieuses seront nécessaires dans tous les secteurs et les systèmes pour parvenir à réduire substantiellement et durablement les émissions et pour assurer un avenir vivable et durable pour tous », indique le GIEC. « Ces transitions systémiques nécessitent une augmentation substantielle des options d’atténuation et d’adaptation ».
L’organisme estime que l’accélération des investissements devra passer par la mise en place de « catalyseurs essentiels ». Il constate en effet que l’argent ne manque pas, mais qu’un certain nombre d’obstacles empêchent de le rediriger vers les initiatives climatiques. La bonne nouvelle, c’est qu’il existe des précédents. C’est notamment le cas des véhicules électriques, dont le nombre sur les routes augmente rapidement. Un tel véhicule coûte plus de 60 000 $ en moyenne, ce qui est presque 40 % de plus que pour une voiture à moteur à combustion interne conventionnelle, soit un prix a priori difficilement justifiable pour la plupart des consommateurs, même pour ceux qui sont favorables au passage à une économie faible en carbone. La situation est toutefois en train de changer, de nouvelles lois sur les ventes de voitures neuves s’ajoutant désormais aux subventions. Non seulement les ménages ont-ils désormais moins à débourser, mais cela crée également un climat de certitude qui est nécessaire si l’on veut attirer l’investissement privé.
« La finance, la technologie et la coopération internationale sont des catalyseurs essentiels à l’accélération de l’action climatique », souligne le rapport du GIEC.
Pour en savoir plus sur le rôle des catalyseurs essentiels dans le déblocage des investissements liés aux changements climatiques, consultez cet article de l’Institut pour le climat de BMO.
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